RELATIONS PATRON-EMPLOYÉ : TROUVER LE BON ÉQUILIBRE
Une relation réussie ne relève pas du miracle. Il faut savoir écouter, expliquer sa stratégie, donner des tâches en cohérence avec les compétences... au profit de la performance de l'entreprise.
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VOUS AVEZ MÛREMENT RÉFLÉCHI VOTRE PROJET. L'embauche d'un salarié répond à votre objectif et vous pourrez le financer (voir p. 42-43). Vous êtes-vous également demandé si vous disposez des qualités nécessaires à un bon management ? Êtes-vous prêt à déléguer une partie de votre travail ? Accepterez-vous de consacrer du temps à transmettre les consignes et, plus globalement, à dialoguer et écouter votre collaborateur ?
Si c'est le cas, vous pouvez rentrer dans la phase active du recrutement... prendre un papier et un crayon pour la rédaction du poste de travail. « Bien des malentendus peuvent être évités si, en amont, le futur employeur a défini les responsabilités et les tâches qu'il souhaite confier au salarié », souligne Sophie Marçot, du Bureau technique de promotion laitière. Elle accompagne les producteurs de lait dans leur réflexion sur leur projet et dans les relations avec leurs salariés ou associés. « Cela conditionne les compétences qui lui seront demandées et, bien sûr, son niveau de rémunération. De même, cela détermine le temps de travail - temps plein ou temps partiel - et les horaires. »
Par exemple, si le souhait est de ne pas traire le soir pour rentrer plus tôt, un profil « élevage laitier » sera recherché. Une présence matin et soir ou seulement le soir peut convenir. À l'inverse, si l'objectif est d'être remplacé sur l'ensemble des activités, un profil polyvalent cultures-élevage sera privilégié pour assurer les travaux du moment. Les compétences demandées en élevage seront alors moins élevées (suivi de la reproduction, santé des animaux, etc.).
À Cintray, dans l'Eure, Frédéric Caroit a choisi de recruter une responsable de troupeau. Il travaille en binôme avec Agnès Delavoye sur l'atelier lait et s'occupe seul des 75 ha de cultures (plus de détails p. 44). Objectif : la qualité de vie en allégeant sa présence à la traite. « Un jour sur deux, l'un ne trait pas le matin. Idem un week-end sur deux, du vendredi soir au dimanche soir inclus. Notre planning est établi sur quinze jours.» Si la salariée commence le lundi matin à 6 heures par la traite, le lendemain, elle prend son poste à 8 h 30. « Agnès ne travaille pas le mercredi pour s'occuper de sa fille. Elle fait la traite du jeudi matin, pas celle du vendredi matin. » « Avec cette configuration, je suis chargée de la traite du week-end, explique-t-elle. De ce fait, la deuxième semaine, j'arrive lundi à 8 heures et mardi à 6 heures. Comme je suis en repos à partir du vendredi soir, j'assure cette fois-ci la traite des jeudi et vendredi matin. Puis nous reprenons un nouveau cycle de quinze jours. »
Cette organisation limpide de Frédéric Caroit et Agnès Delavoye découle d'objectifs clairs et de tâches bien établies. Leur définition peut s'appuyer sur les fiches de postes-type écrites par les chambres d'agriculture, centres de gestion ou services « main-d'oeuvre » des FDSEA. Elles sont un bon support à l'élaboration de l'offre d'emploi et la conduite de l'entretien d'embauche.
MOTIVER LE SALARIÉ, ÇA S'APPREND
En effet, le risque est de confier des tâches qui ne correspondent pas à la compétence du salarié. « À moins de choisir de combler les lacunes par une formation. Un dispositif crédits-formation existe pour cela (voir p. 48, « Du nouveau dans la formation »). Il ne faudrait pas que par la suite, il lui soit reproché son incompétence à cause d'un recrutement mal pensé, insiste Sophie Marçot. Si plusieurs salariés évoluent avec des niveaux de rémunération différents, les fiches de postes facilitent leur justification et peuvent désamorcer d'éventuelles récriminations. »
Une fois les tâches identifiées et le collaborateur recruté, l'aventure commence. De son implication dans le travail dépendent la bonne marche de l'élevage et/ou des cultures et, plus généralement, l'ambiance générale sur l'exploitation.
« Un salarié a besoin de connaître la stratégie de l'entreprise, au moins dans ses grandes lignes », avance Sophie Marçot. Est-ce augmenter la production par vache pour répondre à une rallonge de quotas plus élevée qu'habituellement ? Dans ce cas, la distribution d'un maïs-ensilage pas trop haché pour éviter les troubles métaboliques aura encore plus son sens. Est-ce augmenter progressivement la taille du troupeau pour développer le lait ? Le salarié comprendra pourquoi il lui est demandé d'accorder plus d'attention aux soins des veaux pour réduire le taux de mortalité. Pour la consultante, cette démarche va jusqu'à la fixation d'indicateurs de réussite, à condition bien sûr qu'ils soient réalistes.
DÉCRYPTER LA PERSONNALITÉ DE VOTRE COLLABORATEUR
Donner accès aux résultats mensuels du contrôle laitier, de la laiterie et du GDS, afficher un tableau de suivi mensuel de l'indicateur sont dynamisants. Savoir féliciter le(a) salarié(e) lorsque l'objectif est atteint l'est tout autant. La prime est un bon levier, organiser un moment festif aussi. « L'argent n'est pas le seul moteur de la motivation. Certaines personnes sont sensibles aussi à une reconnaissance exprimée dans un cadre convivial et aux améliorations que propose d'apporter l'employeur pour que cela aille encore mieux. »
Il est important de comprendre ce dont le salarié a besoin. Certains feront bien les tâches demandées sans en connaître véritablement leur finalité. Écrire les consignes de la journée ou de la semaine sur un tableau en hiérarchisant leur priorité a encore plus d'intérêt avec ces salariés. « Ne pas hésiter à investir dans un tableau type Weleda, conseille-t-elle. Lorsque la tâche est réalisée, il est plus gratifiant de la rayer plutôt que l'effacer. À la fin de la journée ou de la semaine, on visualise ainsi l'ensemble du travail effectué. » Ce mode de communication est bien adapté au collaborateur doté d'une mémoire visuelle. Dans le cas contraire, il ne sert à rien de s'inquiéter de tout écrire. S'il a une mémoire auditive, la pause-café du matin, en plus du moment convivial, sera centrale dans la transmission des consignes. En cas d'oublis, trouver avec lui un meilleur système de transmission. « Il faut découvrir les clés de fonctionnement du salarié. »
« Agnès apprécie de ne pas être pressée dans son travail, illustre Frédéric Caroit. De mon côté, je n'ai pas envie d'être derrière son dos pour éviter les heures supplémentaires. À moi d'être souple en accédant à ses demandes lorsqu'elle veut être libérée plus tôt, ou en augmentant de temps en temps sa prime mensuelle lorsqu'elle passe un peu plus de temps dans l'élevage. »
CRÉER LES CONDITIONS D'UNE BONNE COMMUNICATION
L'écoute participe au bien-être du salarié. Lui offrir un cadre de travail agréable aussi. Par exemple, un local en dehors du domicile du patron, où il prend un café, range ses affaires, etc.
Si le salarié évolue dans une société à plusieurs associés, lui désigner son référent pour éviter les dysfonctionnements.
Savoir exprimer des insatisfactions compte également. Des techniques de communication contournent les risques de mésentente. L'une d'elles consiste à éviter le « tu » ou le « vous » accusateur et à mettre en avant son ressenti (« Je suis surpris de... »). Une autre est la méthode dite « sandwich » : commencer par un point positif, poursuivre par la remarque en proposant une piste d'amélioration ou en sollicitant les idées du salarié, terminer par une note générale positive.
On le voit. Une relation employeur-salarié gagnant-gagnant ne s'improvise pas. Le site de la psycoach québécoise Pierrette Desroisiers (www.pierrettedesrosiers.com) propose un test en treize points pour vérifier si vous êtes un patron motivant.
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